Saint-Gobain avance vers le verre plat zéro carbone

C'est une avancée technologique, un tour de force, et ce n'est pas une affaire de « jeune pousse » américaine : le groupe français Saint-Gobain , dont la création remonte à 1665, a réalisé la première production zéro carbone de verre plat au monde.

Cette première, présentée lundi, s'est déroulée la semaine dernière dans son usine d'Aniche, dans le Nord, et a donné lieu à la réalisation de 2.000 tonnes de verre plat, soit l'équivalent de 100.000 fenêtres. Cette première production zéro carbone, fruit de trois ans de recherche, a permis de ne pas émettre l'équivalent de 1.020 tonnes de CO2 mais aussi d'économiser 2.460 tonnes de matières premières vierges, dont 1.600 tonnes de sable.

Substitution

Pour ce faire, les équipes de Saint-Gobain ont substitué intégralement au sable, traditionnellement nécessaire à la production de verre, du calcin. Soit une poudre de verre recyclé provenant dans le cas présent de vitrages en fin de vie, afin d'obtenir une qualité de verre plat équivalente à celle d'une production standard. Cette substitution s'est accompagnée d'une économie d'énergie, la température du four, dont le paramétrage est extrêmement délicat, étant légèrement moindre, de l'ordre de 1.200 à 1.300 degrés pour le calcin. Par ailleurs, la production a été effectuée avec une énergie « verte », du biogaz et de l'électricité décarbonée.

« Au-delà de la prouesse technique, c'est un changement de « business model » », affirme la directrice générale de Saint-Gobain Glass France, Maud Thuaudet, qui reconnaît que le passage de cette expérience à une production à grande échelle « va demander du temps ». A ce titre, l'approvisionnement en calcin est notamment un problème central.

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Si cette poudre de verre recyclé est, de longue date, utilisée dans la production verrière, son recours est limité par le manque de matière disponible. Ainsi, Saint-Gobain a mis trois mois, en mobilisant des fournisseurs partenaires, pour disposer du stock nécessaire de calcin (2.300 tonnes) afin de réaliser sa prouesse d'Aniche.

Le groupe, qui vise globalement la neutralité carbone en 2050, prévoit d'ailleurs d'accroître de manière progressive le recours au calcin dans sa production. Il compte en effet porter d'ici à 2030 sa part de l'ordre de 25 % à 50 % en France - Saint-Gobain y compte trois usines de verre plat -, l'objectif étant de 40 % pour les autres sites dans le monde.

Surcoût

En France, le tonnage de calcin disponible est évalué à 200.000 tonnes aujourd'hui, la part utilisée par Saint-Gobain étant de l'ordre de 5 %. En clair, son augmentation implique davantage d'approvisionnements. C'est pourquoi Saint-Gobain estime crucial le recyclage du verre à « la déconstruction », la récupération du verre plat utilisé dans le bâtiment. La montée en puissance de Valobat, l'éco-organisme de recyclage des produits du bâtiment, devrait aider à structurer la filière.

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Autres sujets sous-jacents au développement d'un verre plus écologique : l'absence de four électrique. Le directeur de la technologie et de la performance industrielle de Saint-Gobain, Benoît d'Iribarne, le chiffre à « plusieurs dizaines de pourcent ».

Compte tenu de toutes ces contraintes, le groupe planche sur la commercialisation d'une nouvelle offre de verre plat avec une composante de calcin accrue, une annonce étant envisagée d'ici à la fin de l'année. « Il faut faire une offre qui soit crédible et tenable », prévient Benoît d'Iribarne.

Par Christophe Palierse

Publié le 17 mai 2022 à 7:30

Mis à jour le 17 mai 2022 à 7:35

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